Les juges haïtiens sortent de leurs gonds, quelques jours après la publication du budget de l’exercice fiscal 2019-2020. Le juge Jean Wilmer Morin, président de l’Association nationale des magistrats haïtiens (ANAMAH), a annoncé que ses pairs sont entrés en grève pour protester contre la façon dont le système judiciaire est traité en parents pauvres dans ce budget publié quatre mois avant la fin de l’exercice. Depuis environ deux ans, les magistrats avaient soumis un cahier des charges au ministre de la Justice. Ils avaient à plusieurs reprises organisé des mouvements de grève pour contraindre le ministre à satisfaire leurs revendications.
« À chaque fois, rappelle Jean Wilner Morin, le ministre nous a fait savoir que nos revendications ne peuvent pas être satisfaites puisqu’il n’y a pas de budget. On s’attendait à ce que les promesses qui nous avaient été faites soient prises en compte dans ce budget », note Jean Wilner Morin. Le juge ajoute qu’ils ont été surpris de constater que ce qui a été consacré dans ce budget au pouvoir judiciaire est une « misère ». 1.5 milliard de gourdes est le montant alloué au CSPJ et à la Cour de cassation, à en croire le président de l’ANAMAH.
Jean Wilner Morin affirme avoir été étonné d’entendre le ministre de l’Economie et des Finances déclarer mardi « qu’historiquement c’est comme ça que le pouvoir judiciaire a été toujours traité ». « Cela veut dire qu’historiquement le pouvoir judiciaire n’a jamais eu d’importance », a souligné Jean Wilner Morin.
« Nous appelons tous les magistrats à un arrêt de travail illimité en attendant une rencontre entre le pouvoir judiciaire représenté or le CSPJ et le pouvoir exécutif pour voir dans quelle mesure une correction peut être apportée », a déclaré Jean Wilner Morin sur Magik 9 mercredi. L’homme de loi annonce que toutes les associations de magistrats vont faire un « front commun pour porter les autorités concernées à prendre de nouvelles mesures et doter le pouvoir judiciaire d’un bon budget ».
Quant aux juges de paix, ils avaient entamé depuis le 1er juin un mouvement de grève en vue de forcer les autorités à augmenter le budget du CSPJ, à réparer et à construire de nouveaux tribunaux et exiger renouveler le mandat des juges pour lesquels le CSPJ avaient déjà donné un avis favorable entre autres.
Suite au lancement de la grève des juges de paix qui est « légitime », nous avons écrit au CSPJ pour l’informer de notre intention de hausser le ton si un couloir de discussion avec l’exécutif n’était pas créé, a ajouté Jean Wilner Morin. Le magistrat se dit conscient que leur mouvement ne sera sans conséquences sur les justiciables mais il affirme qu’ils sont arrivés là parce qu’aucun signal favorable ne leur avait été envoyé. Il accuse aussi le ministre de l’Economie et des Finances de mettre de l’huile sur le feu. « Lorsque le ministre a dit qu’historiquement c’est comme ça que le pouvoir a toujours été traité, il a lancé un appel à la grève », a estimé Jean Wilner Morin. « Cette grève, a-t-il dit, ce n’est pas seulement la grève des magistrats mais la grève de la justice ».
Danio Darius
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Source: Le Nouvelliste